(Quête) Introduction à la haute [Pv. Delamune]

Après être montée sur la colline qui la séparait de sa destination, Della rechercha la bâtisse de Trinette. Elle n'eut pas à fournir beaucoup d'efforts pour la trouver. Le bâtiment surplombait les autres avec tant de majesté qu'il était difficile de passer à côté sans le remarquer. Les contours de fenêtre sculptés en marbre blanc représentaient les navires les plus imposants, rappelant à tous la principale clientèle de ce lieu d'exception. Les murs étaient en pierres de la Dorsale du Fou gravées de symboles Kuuhuuns incompréhensibles pour la jeune femme qui n'avait étudié les langues mortes mais il lui était facile d'imaginer que ces symboles avaient un rapport à la mer verte. Une grande porte en planches de cerisier marquait l'entrée de la bâtisse. Delamune qui avait vu dans sa vie plus d'une œuvre d'art en sculpture sur bois s'arrêta un moment sur les finitions de la porte. Un trait fin et précis, une ligne régulière mais contontenant ces petites imperfections qui font de l'œuvre une pièce unique, aucun doute pour Della, le sulpteur de cette porte était un artiste de renom. Au bas de la porte elle trouva une petite griffure qui ne manqua pas de lui rappeler la table de chez elle. Setanar Moneredetsit, grand sculpteur actuel qui a commencé sur bois pour se perfectionner aux tableaux en reliefs sur pierres.
Della ouvrit la majestueuse porte avec tout le soin qu'elle méritait. Derrière, elle découvrit un monde nouveau où le luxe se melle à la débauche donnant un air surnaturel à ce qu'elle apercevait. Une grande salle meublée de centaines de chaises ordonnées sous forme de cercles autour de tables rondes. Au fond à gauche en faisant dos à la porte, un feu crépitait doucement dans une des plus grandes cheminées que Delamune avait vu. Les chaises étaient disposées à côté de la cheminée, supportant la vingtaine de grands capitaines qui discutaient bruyamment en jouant aux cartes. Au milieu du mur de droite se trouvait un couloir qui menait à la suite de la maison. Ce dernier était fermé par un comptoir dont une partie se levait pour laisser passer ceux qui avaient payé leur consommation afin de s'isoler avec leur aventure d'un soir. Une femme plutôt jeune était assise derrière le comptoir et regardait Della avec insistance. Elle raclât sa gorge afin de faire comprendre à Della qu'elle devait venir se présenter au près d'elle. Delamune s'approcha alors jusqu'au comptoir et demanda à voire Trinette de la part du superviseur.

Avant toute réponse, il lui fallait savoir si oui ou non elle devait parler de sa mésaventure à Trinette. Et cette question ne pouvait attendre d'être réflichie sinon Trinette se serait doutée que Della lui cachait quelque chose. Cette dernière décida alors de faire confiance à son instinct pour savoir comment répondre à cette question plus que délicate. D'autant plus que la jeune Septane avait un retard maintenant de plus de deux semaines et commençait alors à se demandait si elle n'abritait pas un petit être.

Aucune intuition ne parvenait à Della. Sa dernière chance de savoir si oui ou non il fallait lui expliquer les moindres détails restait d'étudier le caractère de Trinette. Mais pour ne pas que le moment de réflexion ne paraisse trop suspect, Delamune commença le récit de ses aventures en restant la plus précise possible. Elle fit attention à toutes les mimiques et micro-expressions qui auraient pu traduire un aspect de la personnalité de son interlocutrice. Afin de se laisser le temps de déceler chaque réaction, elle insista sur les faits qu'une "femme normale" n'aurait jamais fait. Elle pu ainsi recueillir suffisamment d'expressions pour en savoir plus sur la réaction à attendre de Trinette lorsqu'elle apprendrait ce qui s'est passé juste avant l'empoisonnement. Il lui fallait maintenant tout analyser, faisant alors appel à son empathie.

[jet d'empathie]

Il était facile de remarquer que Trinette avait envie de l'aider cependant, le niveau de complexité de son esprit était tel que Delamune ne voulu prendre aucun risque. Cette envie d'aider pouvait masquer un certain profit que Trinette aurait su tirer à son avantage. Et la jeune métis ne voulais en aucun cas devenir une de SES filles. Elle lui expliqua alors comment elle s'était débrouillée pour tuer les trois bandits, lui racontant tout en détails, omettant bien sûr de mentionner sa mésaventure. Elle marqua un temps d'arrêt. Le visage de Trinette était comme figé. Della attendit alors qu'un son sorte de la bouche de son interlocutrice qui bougeait sans qu'aucun mot audible n'en sorte.

Tout s'était passé à une telle vitesse ! Elle n'avait pas eu le temps de souffler une seule fois. Elle avait été métamorphosée de la tête aux pieds. La jeune femme des contrées septentrionales ne pensait pas qu'une robe et un peu de maquillage aurait pu la changer à ce point. Elle s'était crue, pendant cette séance d'habillage express, telle une des poupées de sa jeunesse, exposées dans la vitrine de sa chambre à Mordless. Et aussi vite qu'elle était devenue une autre, elle s'était retrouvé dans sa tenue de voyage, un maquillage subtil sur le visage, telle qu'elle était avant cet essayage. Elle resta immobile, assise sur le lit, songeant à nouveau à ce qu'elle venait de vivre. Elle eut alors un soupir de soulagement en repensant à la situation critique qu'elle venait d'éviter. La Mère avait cru à son histoire sans se rendre compte que Della lui cachait quelques informations. Après ce moment d'introspection, elle se leva, secoua sa jupe afin d'effacer les plis causés par son essayage de ces dernières heures, et sortit de la chambre. Les bruits des hommes jouant dans le hall avait disparu. Tout était calme. Elle avança vers le comptoir, leva sa partie mobile et sortit de la majestueuse bâtisse.

Elle se marcha d'un pas mal assuré, comme guidé par un radar, vers l'auberge. Le soleil avait revêtit son plus bel apparat cousu de fils d'or. Le fond orangé que le ciel affiche lors de la cérémonie du couché se trouvait en arrière plan derrière les vertes collines occidentales des Génelles. Quelques reflets orangés se rendaient visibles sur ces dernière, rappelant les couleurs dominantes de cet instant magnifique qu'est le couché de soleil. Ce spectacle n'avait pourtant pas attiré l'attention de Delamune qui, trop occupée dans ses pensées, se retrouva devant la porte de l'auberge en moins de temps qu'il en faut pour le dire.

Elle frappa puis poussa la porte d'un geste mécanique, presque automatique. Les émotions qu'elle avait vécu dans cette journée dépassait, et de loin, ce qu'elle aurait pu imaginer. Alors que la tenancière lui adressa une salutation chaleureuse, Della lui répondit machinalement "Bonjour", lui semblant totalement improbable d'avoir dans cette journée eut le temps de saluer la tenancière qui était plus obnubilée par la démarche de la jeune femme que par sa réponse. Della se rendit directement dans sa chambre, ne marquant aucun moment d'arrêt depuis son entrée dans l'auberge. Après avoir fermé la porte, elle s'assit sur son lit avant de se mettre en position verticale et fermer ses paupières. Elle ne trouva pas le sommeil, mais reposa son corps endolori par cette rude journée qui venait de s'achever. Une petite heure de relaxation plus tard qui paru quelques minutes à la jeune femme, des pas se firent entendre et s’arrêtèrent derrière la porte de sa chambre. Le léger grincement de la porte fit ouvrir les yeux de Delamune. C'était la tenancière qui était venue lui proposer le couvert. Devant l'aspect indécis dût à la fatigue que Della arborait sur son visage, Ardone (la tenancière) se sentit obligée d'énumérer le menu pour motiver sa jeune invitée, seule cliente de l'auberge pour cette nuit.

"Salade verte assaisonnée d'une vinaigrette, potage à la tomate et aux poireaux et en dessert une tarte aux pommes." Ce n'était pas un menu d'aspect restaurant de la haute mais qui convenait parfaitement à Della qui répondit favorablement à la demande d'Ardone et la suivit jusque dans la cuisine. Cette pièce que la jeune femme n'avait encore pas eu le loisir de visiter était petite mais fonctionnelle. Elle possédait une cheminée pour cuire le potage, et un grand plan de travail pour cuisiner. Se trouvait près de la cheminée une sorte de réceptacle surélevé par un pied en argile dans lequel la cuisinière pouvait nettoyer la vaisselle sale après les repas. Ce n'était pas quelque chose de nouveau pour Della qui en avait déjà vu et utilisée avec sa mère chez elle à Mardless. Une table en chêne qui était disposée au milieu de la pièce se voyait dressée de deux couverts disposés l'un en face de l'autre. Durant le repas, Della raconta sa journée à Ardone qui ne manqua pas d'être étonné que tout puisse tenir en une seule après-midi. Après manger, les deux femmes débarrassèrent ensemble la table et nettoyèrent la vaisselle puis chacune partit dans sa chambre respective avant de s'endormir profondément.

La nuit fut paisible et récupératrice pour les jambes de Delamune qui avaient beaucoup travaillé la veille. Elle se réveilla un peu avant l'aube, sortit un petit encas de son sac, le mangea rapidement se lava et se prépara pour recevoir son cour de bonnes manières. Elle sortit de sa chambre, passa devant le hall où se trouvait la tenancière déjà réveillée, la salua et sortit de l'auberge. Elle marcha alors d'un pas vif et rapide vers la maison de Trinette. Le chemin fut bref, étonnant même la jeune aventurière de ses capacités physiques. Elle salua alors la Mère qui l'attendait justement devant la porte de sa somptueuse maison et qui la salua en retour. Le soleil fit alors son apparition, coloriant la Mer Verte d'un ton jaune orangé qui ne laissa pas indifférent les deux femmes.

Delamune s'appropria le verre que Trinette lui tendait. Elle le fixa quelques instants et se remémora les conseils de sa mère. Elle lui avait dis qu'il ne fallait pas boire en étant enceinte et son retard ne laissait aucun doute sur son état actuel. Mais ne pas accepter de boire serait dévoiler son secret. Elle ferma les yeux comme pour s'excuser de son acte et porta le verre à ses lèvres. Elle pencha le verre afin de faire descendre le breuvage dans sa bouche.

[jet de constitution difficulté 4]

Après ses émotions fortes dues à l'ingestion d'alcool fort, Della n'eut pas le temps de voir à nouveau correctement, une épaisse fumée se dégageait devant son visage. Elle inspira une bouffée malgré elle, maintenant ses paupière fermées et le visage crispé tellement la fumée était chaude. Une petite voix dans sa tête la motivait à garder le contrôle sur ses émotions.

Elle savait intérieurement qu'elle avait échoué au test que lui avait tendu Trinette, mais ces voix d'homme ... à qui appartenaient-elles ? Et si ils lui avait enlevé ses bas et dégrafé leur chemise, pourquoi étaient-ils sortis avant quoi que ce soit ? N'était-elle pas assez intéressante ? Non cette option était peu probable vu ce qu'elle avait déjà vécu. Elle avait retrouvé maintenant la totalité de ses moyens et se souvint alors de cette voix interne qu'elle avait entendu après avoir bu. Elle lui demandait de garder le contrôle mais c'était plus facile à dire qu'à faire. Une chose était sûre, la surprise des évènements lui avait fait perdre ses moyens et elle n'était pas passée loin d'un second drame. Si elle devait passer une seconde fois le test, elle tiendrait mieux le coup mais cela dépendrait de la malice et de l'esprit machiavélique de la Mère.

Après avoir de nouveau pris conscience de tous ses membres, Della se releva difficilement. Le matelas sur lequel elle reposait était tellement confortable que même en pleine forme il serait difficile à n'importe qui de se redresser. Elle s'assit puis se releva. Elle tâtonna à la recherche de ses bas, luttant contre l'obscurité de la pièce dût à la porte fermée et aux volets clos. Elle les trouva et les enfila, manquant de tomber deux fois pour cause de perte d'équilibre. Son oreille interne ne s'était toujours pas remise de l'effet de l'opium et de l'alcool de gingembre. Elle se dirigea vers la porte, glissant la main le long des divers armoires meublant la pièce. Une petite fente en dessous de la porte laissait passer la lumière provenant du couloir. Elle atteignit la porte puis retrouva machinalement la poignée, s'imaginant les proportions comme si elle l'avait taillée. Elle poussa la porte et passa la tête dans le couloir, afin de retrouver Trinette. Cette dernière se trouvait justement côté couloir du comptoir, discutant avec ce qui devait être la secrétaire des lieux. Les deux femmes décelèrent sa présence et se retournèrent afin de confirmer leur intuition. Trinette se dirigeât alors vers Della, ayant la ferme intention de recueillir les sentiments de la jeune métis. Delamune détourna le regard, légèrement honteuse de ne pas avoir réussi le test.

Sans plus se faire prier la jeune femme bascula puis passa la partie mobile du comptoir et sortit de la maison close. Le soleil se reflétait sur les collines proches. Elle n'était pas fatiguée physiquement comme la veille mais plutôt mentalement. Cette fatigue était telle qu'elle se trompa deux fois de ruelle ce qui rallongea son temps de trajet d'une petite vingtaine de minutes. Arrivée à l'auberge, elle monta directement dans sa chambre, prenant tout de même le temps de saluer la tenancière qui était en pleine conversation avec un couple voulant une chambre pour la nuit. Elle tira d'une des armoires son sac dans lequel elle avait de quoi grignoter. Elle prit de quoi combler la petite faim qui la tiraillait et s'endormit aussitôt fini.

La nuit fut longue et ce n'était rien de le dire. En effet la présence du couple dans la chambre voisine de la sienne étant très remarquable, Della ne put s'endormir qu'un bon moment plus tard. Après les élucubrations voisines, elle trouva le sommeil mais les émotions de la journée lui ayant remémoré le traumatisme des trois brigands additionnées aux bruits de la chambre derrière le mur qui servait d’appui pour sa tête de lit, elle cauchemarda une grande partie de la nuit. Ses rêves étaient entrecoupés de micro-réveils qui ne lui laissèrent que le temps de se rendre compte que ce n'étaient que des rêves.

Le lendemain, avant le lever du soleil, le couple dormait encore à poings fermés alors que la jeune métis déjeunait une pomme et un peu de ce qu'elle n'avait pas réussi à finir la veille au soir. Elle sortit délicatement de sa chambre afin de ne pas les réveiller même si elle avouerait que l'idée de les sortir du lit lui a caressée l’esprit. Elle salua Ardone, occupée cette fois ci à graver quelques tablettes d'argile sur lesquelles devaient surement se trouver les prochaines réservations. Elle leva la tête et salua silencieusement la jeune femme. Della se rendit d'un pas légèrement anxieux malgré elle vers la maison de Trinette, qu'elle aperçu à nouveau devant la porte regardant la mer verte.

Della dût répéter une petite dizaine de fois chaque geste afin de les réaliser de manière proche de la perfection. Les notions les plus dures à assimiler étaient celles destinées aux diverses salutations et à l’ordre. L’étiquette lui était une notion étrangère jusqu’à lors. Bien que de parents bourgeois, elle n’avait jamais côtoyé de nobles et n’avait donc reçu aucune éducation sur les manières et postures.

Après avoir réussi à surmonter les effets de l’alcool et de l’opium, elle dût restituer en grande partie ce qu’elle avait appris. Mis à part un pied mal placé dans la salutation qui avait été directement corrigé par l’enseignante, elle imitait sans trop de difficultés des séances de repas, de découverte de logis et de salutation de classes allant du simple saltimbanque aux courtisans les plus distingués. Les notions étant encore fraiches dans sa mémoire, la brume causée par l’alcool et l’opium n’a pas suffi à faire oublier les différentes valeurs acquises.

Les jours et les leçons passantes, la jeune femme ressentait toujours un infime effet de brouillard cérébral malgré l’augmentation continue des doses ingurgitées simultanément. Elle n’apprit pas beaucoup plus, c’était surtout des révisions. Les nouveautés portaient sur les espaces réservés comme le boudoir ou sur le partage des tâches. Mais ces notions étaient déjà connues de Delamune.

Les nuits étaient plutôt calmes en moyenne. Le va et viens des clients ne dérangeaient pas de trop son sommeil profond dût aux émotions de chaque journée. Elle ne se souvint que d’un rêve durant cette semaine d’apprentissage. Un rêve qui l’avait profondément touché. Elle avait été témoin de l’apparition d’une étrange ellipse bleue luminescente. Cette ellipse dégageait une sorte d’aura surnaturelle. De cet objet insolite était sorti un homme de toute beauté. Pas un seul cheveu ne venait cacher son visage. Il était vêtu d’une veste et d’un bas en cuir, le cou entouré d’une écharpe de soie blanche. Sa musculature était parfaitement proportionnée. Mais il n’était pas seul, un majestueux corbeau aux reflets bleutés sortit de la sorte d’ellipse et se posa délicatement sur son épaule. Il coassa avec une telle puissance que la jeune femme se retrouva dans son lit. Les draps aux pieds du lit et ses pieds sur l’oreiller étaient des signes qui ne laissaient aucun doute sur l’agitation de son sommeil. Mais les notions à assimiler étaient tellement nombreuses qu’il n’y avait pas la place pour qu’un rêve monopolise son attention. Après tout ce n’était qu’un rêve, une telle ellipse ne peut exister. Un tel homme non plus d’ailleurs.

Voilà maintenant une semaine que l’apprentissage des règles et coutumes imposées par l’étiquette avait commencé. Della avait l’esprit trop rempli pour réfléchir et compter le nombre de jours passé avec son enseignante. Elle savait qu’elle n’avait pas commencé la veille bien sûr mais pour elle cela faisait que deux ou trois jours qu’elle s’entraînait à la vie des nobles. Trinette quant à elle savait très bien combien de leçon avait été dispensées et les progrès qu’avaient fait sa jeune apprentie. Elle lui préparait justement un petit quelque chose à l’occasion de cette fin de première semaine de travail.